vendredi 25 septembre 2015

LIBYE. Seif el-Islam Kadhafi élu représentant du Conseil suprême des tribus libyennes

Depuis quelques mois, le bruit courrait que Seif el-Islam Kadhafi – fils ainé de l’ancien Guide libyen - avait été libéré par les tribus berbères qui l’ont capturé en novembre 2011, et qu’il se déplace librement dans Zenten, une ville dépendant du « gouvernement» dit de Tobrouk.
Selon le site bien informé Mondafrique, il est non seulement libre de ses mouvements, mais a été élu le 14 septembre dernier représentant officiel du Conseil suprême des tribus libyennes.
 Seif el-Islam Kadhafi
Seif el-Islam Kadhafi


Mauvaises nouvelles, si c'est confirmé, pour les gouvernements fantômes libyens (Tripoli et Tobrouk)… et pour Nicolas Sarkozy, toujours soupçonné d’avoir financé sa campagne électorale présidentielle de 2007 avec de l’argent libyen !
Le Forum national des tribus libyennes qui existait du temps de Mouammar Kadhafi – et qui s’est opposé avec force à l’intervention militaire lancée par Sarkozy - était composé de représentants d’environ 2000 tribus et clans, ainsi que de notables. Même si le Conseil suprême des tribus actuel compte moins de membres, cela donne une idée du poids politique des tribus en Libye, ignoré à dessein et à tort par la "communauté internationale".
Seif el-Islam a été condamné à mort par contumace en juillet dernier lors d’un procès spectacle fabriqué par le régime de Tripoli. La Cour pénale internationale (CPI) le soupçonne de « crimes contre l'humanité » et veut le juger à La Haye, alors qu'elle devrait juger Sarkozy et BHL ... Elle peut toujours attendre...
Aïcha Kadhafi, sa sœur, réfugiée à Oman – après avoir été priée de quitter l’Algérie – envisage de s’installer en Afrique du sud ou au Zimbabwe, où elle espère être mieux traitée et avoir plus de libertés de mouvements. Encore une fois, on voit que la notion d'arabo-musulman couvrant un "monde arabe" est un concept fantasmagorique : les réfugiés "arabo-musulmans" ne sont jamais accueilli par d'autres "arabo-musulmans", parce que ces derniers n'existent qu'en Arabie et au Golfe, qui n'acceptent chez eux des esclaves. Le reste des musulmans, soit 95% n'ont rien à voir avec des Arabes.


Source : http://www.france-irak-actualite.com/2015/09/seif-el-islam-kadhafi-elu-representant-du-conseil-supreme-des-tribus-libyennes.html?utm_source=flux&utm_medium=flux-rss&utm_campaign=politics
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En analysant la situation en Libye, déchirée entre deux gouvernements rivaux luttant pour le pouvoir, Lionel (Michael Lebron), personnalité de la radio et de la télévision new-yorkaise, explique qu’il est un peu tard pour s’étonner. 

RT : Sur le blog officiel du département d’Etat américain, Jonathan Winer, émissaire spécial des Etats-Unis pour la Libye, a écrit mercredi la chose suivante : «Il y a quatre ans que les Libyens se sont réunis pour saisir le moment et renverser leur dictateur». Que pensez-vous de cette déclaration ?
Lionel: Quand cela s’est-il passé? Mon souvenir est totalement différent. Je me souviens de séries d’actions militaires de l’OTAN et d’autres forces, qui ont simplement éliminé un dirigeant souverain qui serait supposément devenu «despotique». Et c’est pour cette raison qu’il a été rayé de la carte. Mon souvenir diffère donc de celui d’une vague de combattants révolutionnaires épris de liberté renversant leur dirigeant tyrannique.
RT : «Des Libyens travaillent ensemble pour surmonter leurs différends et réaliser leur aspiration démocratique de la révolution, pour vivre dans un état démocratique basé sur les droits de l’homme», lit-on aussi dans ce blog. Etes-vous d’accord ?
Lionel: De quelle aspiration à la démocratie parlons-nous ? Il suffit de jeter un coup d’œil sur ce qui s’est passé du temps de la Libye italienne sous Mussolini. Il s’agissait de la Cyrénaïque, de la Tripolitaine et du Fezzan, trois régions différentes, trois groupes de gens qui ont été assemblées, liées, collées les unes aux autres. Ce que beaucoup en Europe ne peuvent pas comprendre, c’est que parfois afin de maintenir ces gens ensemble, il faut parfois utiliser des forces que nous n’acceptons pas nécessairement. Je ne cautionne pas la brutalité. Mais il est à noter que nous ne comprenons pas qu’on ne peut maintenir un tel groupe ensemble sans un leader strict et fort. Ainsi, lorsqu’on retire ce contrôle, on a le chaos, de nouvelles forces apparaissent pour combler le vide. Auparavant, on avait quelque chose qui marchait, mais une fois les règles, les barrières et les limitations disparaissent, on se retrouve dans le chaos.
RT : Cependant, le même rapport dit qu’«Aujourd’hui les Libyens ont fait de véritables progrès dans les négociations vers la formation d’un gouvernement national unifié. Qu’est-ce qui a fait dire une chose pareille à Jonathan Winer ?
Lionel: Quand j’ai lu ça, j’étais presque mort de rire, je me suis même demandé «de quel pays s’agit-il ?». Cela sonne comme une version hollywoodienne de la réalité.
Je me souviens avoir évoqué le cas de Benghazi durant un de mes programmes, un endroit dont personne n’avait jamais entendu parler. Et quand ils ont montré une image du tribunal des rebelles, c’est le drapeau d’Al-Qaïda qui flottait à son sommet ! Les rebelles, les combattants de la liberté sont en fait des combattants d’Al-Qaïda !
Sur place tout le monde le savait, mais nos grands médias occidentaux nous ont donné une toute autre image, ne sélectionnant qu’une partie de l’information en omettant tout le reste. Ils ont ainsi créé une fiction, un conte de fées pour nous montrer à quel point la situation en Libye est similaire à notre révolution américaine. Et ces courageux patriotes qui se battent pour leur pays afin de vivre librement, sans les contraintes de leur dirigeant devenu fou. Cette idée a été propagée sans être vérifiée, et tout le monde a cru cette histoire sans y réfléchir. Et je me pose la question pourquoi est-ce que tout le monde est surpris maintenant ? Où avez-vous été ces quatre dernières années ?
Gilles Munier

Analyse par Bernard Logan

Le 14 septembre 2015, un coup de tonnerre a retenti dans le ciel serein des certitudes démocratiques européocentrées quand le Conseil suprême des tribus de Libye a désigné Seif al-Islam Kadhafi comme son représentant légal. Désormais, voilà donc un fils du défunt colonel seul habilité à parler au nom des vraies forces vives de Libye…

Les abonnés à l’Afrique Réelle et les lecteurs de ce blog ne seront pas surpris par cette nouvelle puisque, depuis 2012, je ne cesse d’écrire :
1) Que la pacification de la Libye ne pourra se faire qu’à partir des réalités tribales.
2) Que le seul à pouvoir reconstituer l’alchimie tribale pulvérisée par l’intervention militaire de 2011, est Seif al-Islam que son père, le colonel Kadhafi, avait pressenti pour lui succéder, et qui est actuellement détenu par les milices de Zenten.

Mes analyses ne procédaient pas du fantasme, mais du seul réel que voici :
1) En Libye, la grande constante historique est la faiblesse du pouvoir par rapport aux tribus. Au nombre de plusieurs dizaines, si toutefois nous ne comptons que les principales, mais de plusieurs centaines si nous  prenons en compte toutes leurs subdivisions, ces tribus sont groupées en çoff (alliances ou confédérations).
2) L’allégeance des tribus au pouvoir central n’est jamais acquise.
3) Les bases démographiques des groupes tribaux ont glissé vers les villes, mais les liens tribaux ne se sont pas distendus pour autant.

Le colonel Kadhafi a fondé son pouvoir sur l’équilibre entre les trois grands çoff libyens, à savoir la confédération Sa’adi de Cyrénaïque, la confédération Saff al-Bahar du nord de la Tripolitaine et la confédération Awlad Sulayman de Tripolitaine orientale et du Fezzan, à laquelle appartiennent les Kadhafda, sa tribu. De plus, à travers sa personne, étaient associées par le sang la confédération Sa’adi et celle des Awlad Sulayman car il avait épousé une Firkèche, un sous clan de la tribu royale des Barassa. Son fils Seif al-Islam se rattachant à la fois aux Awlad Sulayman par son père et aux Sa’adi par sa mère, il peut donc, à travers sa personne, reconstituer l’ordre institutionnel libyen démantelé par la guerre franco-otanienne. Mais pour comprendre cela, encore faut-il se rattacher à la tradition du maréchal Lyautey concernant les affaires indigènes et répudier l’approche universaliste des cerveaux à nœud du quai d’Orsay.
Aujourd’hui, les alliances tribales constituées par le colonel Kadhafi ont explosé ; là est l’explication principale de la situation chaotique que connaît le pays. En conséquence de quoi, soit l’anarchie actuelle perdure et les islamistes prendront le pouvoir en Libye, soit les trois confédérations renouent des liens entre elles. Or, c’est ce qu’elles viennent de réaliser en tentant de faire comprendre à la communauté internationale que la solution passe par les tribus… Certes, mais la Turquie et le Qatar veulent la constitution d’un État islamique et la justice internationale a émis un mandat d’arrêt contre Seif al-Islam…

Bernard Lugan
– Le 24 septembre 2015 – Source bernardlugan