jeudi 11 août 2016

Russie / Turquie: prêts et disposés



Un réalignement géopolitique majeur a lieu en ce moment entre les États-Unis, la Russie et la Turquie.

Alors que l'OTAN utilise la Turquie pour «défendre» le flanc sud de l'Europe (en menaçant le flanc sud de la Russie), l'Union européenne a éconduit la Turquie, qui voulait s’y joindre, depuis des décennies. Ces derniers temps, l'Europe a demandé à la Turquie de la sauver des conséquences désastreuses des guerres américaines dirigées contre les pays musulmans, qui ont poussé des centaines de milliers de réfugiés vers ses rives. Dans une ironie suprême, après avoir exclu la Turquie musulmane du club chrétien européen, l’Europe se trouve accueillant plus musulmans réfugiés que l'ensemble de la population de la Turquie.
La Turquie ne s’est peut-être pas bien comportée dans cette affaire, mais pour le moment, elle est en train de modifier l'équilibre géostratégique du continent eurasien. Elle occupe une position géographique clé entre l'Europe et l'Asie, et à la fin de la Seconde Guerre mondiale, elle a lié son sort à l'alliance euro-atlantique en adhérant à l'OTAN, apportant sa grande armée, bien formée dans le syndicat anti antisoviétique. Cette politique est conforme à des siècles de relations souvent belliqueuses entre l'Empire ottoman musulman et l'Empire tsariste orthodoxe. Pourtant, soixante-cinq ans de fidélité à l'Occident n’a pas fait bouger d'un iota l’hostilité belliqueuse et l’arrogance colonisatrice de l’Occident chrétien envers tous les musulmans, y compris ses plus fidèles « alliés ».
En plus des tentatives extrêmement sanglantes  des États-Unis d'apporter de «changement de régime» en Syrie, ou le rejet continu par l'Europe de la Turquie pour des raisons religieuses évidentes (retardant l'octroi de voyages sans visa pour les citoyens turcs en échange pour la Turquie du traitement des demandes de réfugiés vers l'Europe), il y a  deux autres développements internationaux cruciaux: les États-Unis qui accumulent de fausses accusations contre la Russie, en vue de la forcer dans la guerre, et l'augmentation de la coopération du président Poutine avec la Chine par l'intermédiaire de l'Accord de coopération de Shanghai, la Communauté économique eurasienne et la Silk Road Project également connu comme One-Belt, One Road, qui reliera l'Europe à l'Asie par le rail et la route.
 
Il semblerait que le président erratique de la Turquie a réalisé qu'il est maintenant plus avantageux pour son pays de reconnaître ses racines orientales et asiatiques que d'essayer de se greffer sur une culture religieuse étrangère, séculièrement hostile, représentée par l'Occident. Outre les avantages économiques évidents de se joindre à une communauté qui s’étire du Bosphore au Pacifique, la Turquie et la Russie considèrent la religion comme un facteur prépondérant dans la gouvernance, une allégeance que, dans le contexte international actuel, est aussi importante que la puissance militaire.